Au Cameroun, une bibliothèque dédiée à Cheikh Anta Diop

Une photo de Cheikh Anta Diop dans la bibliothèque du même nom, située à Bonabéri, près de Douala.

SENtract – Le savant sénégalais vit toujours dans les mémoires, mais aussi au Cameroun à travers une bibliothèque située à Bonabéri, un canton de la ville de Douala. 

 

Un jour pas comme les autres dans une bibliothèque pas comme les autres. Ce jour de décembre 2021, le maire de la ville de Douala visite la bibliothèque Cheikh Anta Diop de la fondation AfricAvenir à Bonabéri.

Les tamtams résonnent pour invoquer les ancêtres afin qu’ils bénissent la circonstance. L’esprit des ancêtres est à présent parmi les visiteurs. Ils sont conduits par le fondateur de cette bibliothèque, Prince Kum’a Ndumbe 3 :

« Monsieur le maire, vous avez ici 300 livres sur la naissance du Cameroun. La particularité est que ce sont des livres qu’on ne trouve dans aucune université. Ça, c’est le premier maître que les Allemands ont envoyé au Cameroun : Theodor Christaller. Vous allez voir, monsieur le maire, ça c’est un livre qui a été publié en 1897. Et on voit la toute première école allemande au Cameroun« .

Prince Kum’a Ndumbe 3, fondateur de la bibliothèque Cheikh Anta Diop.

Une histoire qui s’arrête à l’arrivée des Occidentaux en Afrique

Plus qu’un centre de recherche, la bibliothèque Cheikh Anta Diop est un lieu de mémoire. Sa spécialité est la civilisation africaine : l’histoire, la culture, les langues. Avec un fond de plus de 100.000 livres, cette bibliothèque hors du commun en Afrique centrale remonte l’histoire de l’humanité jusqu’à l’homo erectus, c’est-à-dire le premier humain à marcher sur ses deux pieds.

Or, l’histoire enseignée dans les écoles camerounaises s’arrête jusqu’ici à l’arrivée des Occidentaux en Afrique, comme l’explique l’universitaire Philémon Moubeke :

« Il faut situer la bibliothèque Cheikh Anta Diop dans le grand ensemble qu’est la fondation AfricAvenir International. La fondation AfricAvenir International est un lieu de mémoire qui se propose de restaurer l’homme africain dans sa dignité, dans sa civilisation, dans ses processus historiques. Parce qu’avec le processus de la plantation, c’est-à-dire de l’esclavage, l’homme africain a été déconnecté de sa propre culture, il y a eu comme un effacement relatif de la mémoire africaine« , estime Philémon Moubeke. « Et la bibliothèque Anta Diop donne un fond documentaire pour réarticuler notre rapport au monde, notre rapport à nous-mêmes, recommencer à penser par nous-mêmes« .

Le maire de Douala, Roger Mbassa Ndine, exprime son sentiment au terme de sa visite.

« C’est une grande bibliothèque que nous avons vue. Cheikh Anta Diop est un Africain, un grand Africain qui a beaucoup fait pour l’Afrique. Pour ceux qui ont lu les ouvrages de Cheikh Anta Diop, ils savent que c’est un homme qui a déblayé le chemin pour la renaissance de l’Afrique. Et donc une bibliothèque Cheikh Anta Diop à Douala, ce n’est que justice« , estime le maire de Douala.

Roger Mbassa Ndine, le maire de Douala, en compagnie de Prince Kum’a Ndumbe 3.

 

Une bibliothèque en constant développement

La bibliothèque Cheikh Anta Diop a été fondée en 1993. L’accès se fait par abonnement qui peut aller d’un jour à un an.

Mais le lieu se développe toujours. La bibliothèque fait en effet d’un grand ensemble qui comprend une galerie d’arts, une unité de production audiovisuelle avec une station web radio et une école doctorale qui offre depuis 2014 des bourses universitaires.

Enfin, s’y ajoute le projet de l’Université de la renaissance africaine, déjà validé par le gouvernement camerounais, prévu pour ouvrir dans trois ans avec un campus à Douala et un autre à Yaoundé.

Source : DW Afrique