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[Entretien] Mona Tayara : « l’identité ne se ruine pas. Malgré un pays anéanti, le Liban se redresse par la littérature pour survivre »

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SENtract – Salut Mona Tayara. C’est à travers votre contribution dans le projet du Collectif Adinkra femmes qui a publié le fait littéraire intitulé Mon corps et moi, aux Éditions Adinkra, au Cameroun, en avril 2021, que nous avons fait votre connaissance. Pourriez-vous vous présenter, et ensuite nous parler de cette expérience littéraire ?

Bonjour. Je m’appelle Mona Tayara. Je suis d’origine libanaise. J’ai fui la guerre du Liban en 1975, et je me suis installée en France pour terminer mes études scolaires. De retour au pays, j’ai obtenu un B.S en business administration sans aucune conviction ! Plus tard, j’ai obtenu mon master à la Sorbonne Nouvelle. La littérature et l’enseignement m’attiraient énormément. Aujourd’hui, je vis aux Etats-Unis depuis 20 ans dans un petit village de la Pennsylvanie.  Je suis tombée par hasard sur les réseaux sociaux sur un appel à textes autour de trois thématiques fortes dont l’une est : «  Mon corps et moi ». Sans hésitation,  je me suis lancée. Une expérience littéraire particulière, car il fallait écrire la violence.

 

Avant votre contribution à l’élaboration de l’œuvre Mon corps et moi du collectif adinkra femmes, est-ce que l’un de vos textes avait déjà été publié ? Comment avez-vous commencé à écrire ?

Je n’ai pas publié de textes encore. J’espère un jour. J’ai commencé à écrire, dès mon plus jeune âge de la poésie. Cela me consolait lorsque j’étais triste. Puis un jour, mon professeur de français m’a demandé de lire ma poésie en classe et j’ai eu des félicitations.  L’émotion de ce jour m’a encouragée à poursuivre dans l’écriture des poèmes et d’autres textes.

 

Dans quelle langue avez-vous commencé à écrire ? Et que pensez-vous de la traduction littéraire, au regard des polémiques autour de la traduction littéraire comme celle de l’affaire Gorman aux États-Unis?

J’ai toujours écrit en français pour la simple raison qu’au Liban, j’étais à la mission laïque française. Nous avions plus de cours en français qu’en arabe.

Amanda Gorman : « Nous devons avant tout mettre de côtés nos différences » et tout est dit ! Nous sommes avant tout une race humaine et je trouve Amanda Gorman magnifique. Les polémiques au sujet de la traduction ont pris une ampleur sans précédents.  La littérature n’a pas de couleur. Et je reprends la merveilleuse phrase de Maryse Condé : « Est-ce qu’un écrivain doit avoir une identité définie ? Est-ce qu’un écrivain ne pourrait pas être constamment errant, constamment à la recherche d’autres hommes ? Est-ce que ce qui appartient à l’écrivain, ce n’est pas seulement l’écriture, c’est-à-dire quelque chose qui n’a pas de frontières ? »    

 

Vous êtes libanaise, vous avez étudié en France, vous vivez aux États-Unis, vous publiez  au Cameroun. « Citoyenne culturelle » et/ou « citoyenne du monde » finalement ?

Je suis citoyenne du monde et cela me fait penser à Edouard Glissant  dans son ouvrage « Poétique de la relation ». La rencontre des cultures pour un monde humain.

 

Depuis l’explosion du port de Beyrouth, le 4 août 2020, il se dit davantage que « l’identité libanaise » serait en ruine. Sa littérature aussi ?

Bien au contraire, l’identité ne se ruine pas. Malgré un pays anéanti,  le Liban se redresse par la littérature pour survivre. Plusieurs écrivains ont écrit leur révolte, leur désespoir et leur malheur sur des papiers enflammés par la misère pour que l’histoire témoigne, pour que la littérature perdure  toujours et à jamais.

 

Pour vous, âme bohème, presque lunatique aussi, lorsqu’on vous lit ou qu’on parcourt votre interface virtuelle Facebook ; qu’est-ce que la littérature ?

La littérature est vie, force de vie, un battement de cœur perpétuel, « une ligne de fuite » selon G. Deleuze.

 

Quels sont vos projets littéraires ? Envisagez-vous, un jour, un retour définitif au Liban ?

Terminer l’écriture d’un livre.

Je n’envisage pas retourner au Liban en ces moments très difficiles, que dis-je ? Ce n’est pas des moments, mais des vies agonisantes au quotidien.

 

Nous sommes au début d’un siècle, marqué par les violences généralisées, où l’avenir et le devenir du monde sont discutés dans presque tous les couloirs de la connaissance. Quel est le constat que tire la citoyenne du monde Mona Tayara ?

Certes la violence, les violences n’ont jamais cessé. Elles augmentent, se multiplient et se nomment différemment. L’humain se meure. L’égoïsme et le racisme sont au sommet de la criminalité, mais Nihil sub sole novum !

Merci Mona Tayara.

 

Baltazar Atangana Noah

Critique littéraire

noahatango@yahoo.ca 

 

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