État « sans transition » au Mali : le « tout-puissant » colonel Assimi Goïta a démis le président et le premier ministre

Assimi Goita, le chef de la junte au pouvoir au Mali, lors d’une cérémonie au camp militaire de Kati, le 6 septembre 2020. PHOTO / ​Matthieu Rosier / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP

[Tract] – Le colonel, également vice-président, est vraiment « tout-puissant ». Après avoir renversé, le 18 août 2020, le président élu, Ibrahima Boubacar Keïta alias IBK, il a fait sauter de leur fauteuil de président et de premier ministre, Bah N’Daw et Moctar Ouane, accusé de tentative de « sabotage » de la transition.

Alors, la fatwa est bien tombée, dans ce pays pays encore troublé et tiraillé entre violences terroristes et envies putschistes. Au lendemain de leur arrestation par des militaires, le président malien et le premier ministre de transition, ont été démis, mardi 25 mai, de leurs fonctions.

« Le processus de transition suivra son cours normal et les élections prévues se tiendront courant 2022 », a également déclaré le colonel Goïta, dans une déclaration lue à la télévision publique par un collaborateur en uniforme.

Le colonel, cerveau des putschistes, a fait des remontrances au président et au premier ministre pour avoir formé un gouvernement sans se concerter avec lui, bien qu’il soit chargé de la défense et de la sécurité, domaines cruciaux dans le pays en pleine tourmente.

« Une telle démarche témoigne d’une volonté manifeste du président de la transition et du premier ministre d’aller vers une violation de la charte de transition (…), d’où une intention avérée de sabotage de la transition », a-t-il estimé. La charte, grandement rédigée par les colonels, est un texte de référence de la transition censée ramener des civils au pouvoir.

 

Mainmise des militaires sur le pouvoir

Le président et le premier ministre maliens ont été arrêtés lundi, quelques heures à peine après avoir formé un nouveau gouvernement. La composition du gouvernement communiquée le même jour a, semble-t-il, mécontenté les colonels. Certes, des militaires conservaient des postes-clés, mais deux figures de l’ancienne junte étaient écartées des portefeuilles primordiaux de la défense et de la sécurité.

Mardi, le colonel Goïta, qui est également vice-président de la transition, a assuré s’être vu « dans l’obligation d’agir » et de « placer hors de leurs prérogatives le président et le premier ministre ainsi que toutes les personnes impliquées dans la situation ».

« Ce qui a été conduit par les militaires putschistes est un coup d’Etat dans le coup d’Etat inacceptable, qui appelle notre condamnation immédiate », a réagi mardi le président français, Emmanuel Macron, à l’issue d’un sommet européen. « Nous sommes prêts, dans les prochaines heures, si la situation n’était pas clarifiée, à prendre des sanctions ciblées » contre les protagonistes, a affirmé M. Macron, la France demandant une réunion d’urgence au Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies (ONU).

De son côté, le Royaume-Uni a demandé la « libération immédiate, sûre et inconditionnelle de tous ceux qui ont été arrêtés ». Le ministère des affaires étrangères britannique, Dominic Raab, s’est dit « très préoccupé » par le risque « que les événements récents ne minent les efforts en cours pour restaurer l’ordre [constitutionnel] dans les temps impartis ».

Sous la conduite discrète du colonel Goïta, les militaires ont conservé la mainmise sur le pouvoir. Ils se sont engagés, sous la pression de la communauté internationale, à restituer ce pouvoir à des civils élus au bout de dix-huit mois, et non trois ans comme ils l’estimaient nécessaire.

Le Mali, pays de 19 millions d’habitants, et ses voisins nigérien et burkinabé sont pris dans un tourbillon de violences, notamment djihadistes et intercommunautaires, qui ont fait des milliers de morts et des centaines de milliers de déplacés.

Tract avec AFP et Reuters