[Tribune] Iran : Il est temps de mettre fin à l’immunité de Raisi pour ses crimes contre l’humanité (Par Khadijeh Borhani*)

Sentract – Le 3 août, le nouveau président iranien a été investi. Ebrahim Raisi incarne la cruauté et la violence du régime totalitaire, semant le meurtre et la destruction à l’intérieur de l’Iran et de la région. Deux de mes six frères ont été exécutés par le régime totalitaire religieux iranien lors du massacre de 1988.

 

Raisi était l’un des membres principaux des comités de la mort qui ont contribué à ce massacre. Ces comités ont mis en œuvre l’historique inhumaine fatwa l’ayatollah Khomeiny, le fondateur de la République islamique. La fatwa leur a ordonné d’éliminer toute personne s’opposant au régime, en particulier les Moudjahidines. Raisi est connu comme « le bourreau de 88 » en Iran. Son affectation en tant que nouveau président iranien est une tentative désespérée de Khamenei pour contrôler l’Iran au profit de régime mourant.

Le visage souriant et angélique de mon frère de 17 ans est gravé dans mon cœur, et est devenu une partie de mon être. Tout ce que Seyyed Mohammad Hossein Borhani, qui était en quatrième année de lycée, voulait, c’était exprimer son opinion. Il distribuait le Moudjahidine – la publication de l’organisation Mojahedine e-Khalq – dans les rues et les ruelles de Qazvin, une ville à l’ouest de Téhéran. Le 25 mars 1981, il a été arrêté pour avoir vendu le journal Moudjahidine et a été exécuté en 1988, parmi plus de 30 000 autres.

Mon autre frère, Seyed Ahmad Borhani, a été arrêté en août 1981 et condamné à 15 ans. Son crime était son affiliation avec les Moudjahidine. Après plusieurs transferts de prison, il a été exécuté avec 30 000 prisonniers politiques. Pendant son séjour en prison, il a subi une torture cruelle et un harcèlement continus. La plupart des prisonniers ont été exécutés en raison de leur affiliation aux Moudjahidines, de leur croyance en la liberté et de leur opposition au régime oppressif qui réprime ces libertés. Raisi a joué un rôle crucial dans l’un des comités de la mort, il a prononcé une condamnation à mort pour des prisonniers comme mon frère de 17 ans en quelques minutes. Son choix par Khamenei pour être président n’est pas sans raison, il est son espoir de renforcer son appareil répressif.

Selon Amnesty International, malheureusement, l’impunité règne dans mon pays, l’Iran. Je suis le seul qui reste d’une famille de dix membres. Mes quatre frères ont été exécutés avant le massacre de 1988, et mes deux autres frères et la femme de mon frère Mohammad Mehdi Borhani ont été exécutés lors du massacre des prisonniers politiques en 1988. Mon père, un clerc, a été dépouillé de sa tenue d’ecclésiastique pour s’être opposé au régime qui a fait de la religion un outil de son pouvoir. Mon père est mort des pressions qu’il subissait en prison, et ma mère est décédée du chagrin de la perte de ses enfants.

En 1975, mon frère aîné Seyyed Mohammad Mehdi Borhani, professeur de philosophie, maitrisant cinq langues vivantes, a été arrêté pour son engagement politique contre la dictature du Shah. Il a été emprisonné pendant sept ans et soumis à de brutales tortures. Il était très populaire dans notre ville natale Qazvin, à l’ouest de Téhéran. Il était membre de l’organisation Moudjahidine, et de ce fait, il fut de nouveau arrêté en 1982, emprisonné et torturé. Après son exécution, ma famille ne savait pas où il était enterré. Tout ce que nous avons entendu, c’est que de nombreuses victimes du massacre de 1988 ont été enterrées dans la région de Khavaran.

Mon autre frère, Seyed Mohammad Ali Borhani, était étudiant à l’Université des Mines de Shahroud. Il était un génie et avait suivi plusieurs cours difficiles simultanément. Au cours de sa première année à l’université, il a été transféré à l’Université de Téhéran en tant que professeur assistant. Sa première arrestation a eu lieu en 1978 pour s’être opposé au régime du Shah. Après la soi-disant Révolution de Khomeiny en 1979, les professeurs opposés au régime ont été expulsés, y compris mon frère. Il a été arrêté pour ses activités et son affiliation avec les Moudjahidines. Les hypocrites est le nom que le régime attribue aux Moudjahidines. Vingt jours après l’arrestation de mon frère, il a fait face à cinq simulacres d’exécution, a été soumis à d’horribles tortures, les gardes ont gravé « Mort aux hypocrites » avec ses cigarettes sur son corps. Après des tortures répétées à l’âge de 24 ans, il a été abattu avec quatre autres personnes à 4 heures du matin le 9 septembre 1981. La nouvelle de son exécution a été immédiatement rapportée dans les journaux. Son corps a été remis à ma famille parce que nous avons convenu de ne pas organiser de funérailles.

Mon autre frère, Seyyed Mohammad Mofid Borhani, également militant politique sous le règne du Shah, a rejoint les Moudjahidines après la Révolution de 1979. En 1981, ont commencé les arrestations et les exécutions des membres et des sympathisants des Moudjahidines, mon frère a alors engage une vie secrète. En août 1988, il a été martyrisé lors d’un affrontement avec les gardiens de la révolution.

Mon plus jeune frère, Seyyed Mohammad Hassan Borhani, qui avait 15 ans, a vendu le journal Moudjahidine. Il était un étudiant talentueux et avait obtenu plusieurs bourses. Il était un peintre expert de produits artisanaux élaborés. Le 20 juin, les voyous des gardiens de la révolution ont attaqué son kiosque, l’ont arrêté ainsi que ses amis, les ont emprisonnés et torturés. Il a été emprisonné pendant quatre ans sans inculpation. Libéré ensuite en 1985 où il a décidé de quitter le pays pour rejoindre les Moudjahidines. Alors qu’il traversait la frontière en 1988, il a été tué par la sécurité des frontières du régime.

Khamenei a nommé le bourreau des Moudjahidines comme « président » alors que les voix appelant à la « mort pour le dictateur » s’élèvent dans tout l’Iran. La présidence de Raisi a mis fin à toute illusion de modérés ou de réformistes dans ce régime. Le faible taux de participation n’atteignant pas 10% à la récente élection présidentielle en juin 2021 est sans aucun doute le résultat de nombreux soulèvements qui ont commencé en 2017 et qui se poursuivent toujours dans tout l’Iran, en particulier ces dernières semaines. Le peuple iranien revendique un Etat de séparation de la religion et de l’État, de respect du libre culte, de l’égalité des sexes, d’un Iran non nucléaire et sans armes de destruction massive. Khamenei tente vigoureusement de reporter un autre soulèvement généralisé en continuant d’interdire l’importation de vaccins Covid-19, même au prix des vies des iraniens. 

La politique d’apaisement des pays occidentaux avec le fascisme religieux au pouvoir en Iran est non seulement vaine, mais sape également les valeurs de la démocratie occidentale. La communauté internationale doit soutenir le peuple iranien et la résistance iranienne. Ceux-ci ne souhaitent qu’établir une république démocratique basée sur les votes du peuple et la séparation de la religion et de l’État.

*khadijeh Borhani est ancienne prisonnière politique du régime iranien 

 

https://youtu.be/yeMqgOly1Fg 

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